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— Pour moi, je suis sûre de voir le mien encore mieux accueilli que le vôtre, dit madame de Cernan en passant au col d’Ermance une petite chaîne de cheveux à laquelle pendait une cassolette d’or émaillée ; car, ajouta-t-elle, cette chaîne m’a été donnée par la mère d’Adhémar lorsqu’elle fut obligée de faire couper les beaux cheveux de son fils pour l’envoyer au collége. Ce fut un vrai désespoir pour nous ; mais non pour Adhémar, qui laissait en courant à chaque buisson quelques mèches blondes ; enfin, pour nous consoler de ne plus lui voir sa belle chevelure, ma sœur en fit natter deux chaînes, et me donna celle-ci.

— Combien je vous remercie ! dit Ermance en embrassant madame de Cernan avec une vive émotion ; ce don m’est doublement précieux, il ne me quittera jamais.

— Allons, voilà mon bouquet détrôné, reprit en riant M. de Maizières ; mais il s’en vengera un jour de bal.

— À propos de bal, dit madame de Cernan, n’avez-vous pas reçu des billets pour ceux de la cour ?

— Si, madame ; et je venais dire à mon oncle qu’étant un peu souffrante, j’allais m’excuser de ne pouvoir m’y rendre.

— C’est impossible, ma chère ; vous n’êtes pas assez malade pour vous dispenser d’un semblable devoir. Songez donc que c’est l’empereur lui-même qui vous a fait inscrire sur la liste, et qu’il déteste qu’on ne paraisse pas fort honoré et fort empressé de se rendre à ses ordres ; car des invitations royales ne sont jamais autre chose, croyez-moi. À moins d’être mourante, vous ne pouvez vous y soustraire ; sinon l’empereur supposera que c’est dédain de la part des Lorency, et votre mari en portera la peine.

— Quoi ! vous supposez qu’il s’apercevrait de mon absence au milieu d’un cercle si brillant ?

— Ah ! je n’en doute pas, dit M. de Maizières, et c’est toute galanterie à part, car vous seriez aussi laide que vous êtes jolie qu’il verrait bien que votre nom lui manque.

— Eh ! qu’a-t-il besoin de quelques anciens noms ? n’a-t-il pas formé sa cour de presque tous les souverains de l’Europe ? dit madame de Lorency.