Page:Nichault - Un mariage sous l empire.djvu/120

Cette page n’a pas encore été corrigée

et vous m’encouragez par l’espoir de mériter un jour le pardon que je ne pourrai jamais, hélas ! implorer de lui ! Mais le ciel et vous seront les juges de mes efforts ; et si je meurs avec votre bénédiction, je croirai qu’Adhémar pardonne.

— Pauvre Ermance ! dit son oncle en la relevant pour la presser sur son cœur ; va, tant de douleur et de courage seront récompensés ! le ciel ne permettra pas que la perversité triomphe ; il déconcertera les infâmes qui ont juré ta perte ! Mais redoute-les ; songe qu’ils épient tes larmes, et qu’ils en pourraient deviner la cause ; songe qu’après s’être flattés de t’associer pour toujours à leurs coupables plaisirs, à leur secte immorale, ils ne te pardonneront point de t’être relevée de l’abaissement où ils t’ont plongée ; cache leur ton repentir, et laisse-les réunir sur moi seul tous leurs ressentiments. Je consens à passer pour un vieillard tyrannique chargé d’exercer sur toi la plus sévère surveillance. Ils m’accuseront de t’éloigner d’eux, de te soustraire à leur perfide influence ; ils me haïront enfin, et la pitié qu’ils auront pour ton sort, le mépris que leur inspirera ta docilité à te soumettre aux volontés d’un vieil oncle les empêcheront de sévir contre toi. Mais j’ai besoin que tu me secondes dans tous ces projets ; sois donc plus courageuse. Tu trembles, tu pâlis ! Promets-moi de ne plus t’abandonner ainsi au désespoir.

— Oui, je vivrai pour vous, pour mériter tant de bonté par ma reconnaissance ! dit Ermance d’une voix presque éteinte, je dévorerai mes larmes, mes souffrances ; vous seul saurez…

Mais ce pénible entretien avait épuisé ses forces, elle ne put achever. M. de Montvilliers, alarmé de l’état où il la voit, fait appeler Mélanie, la recommande à ses soins. Mais, sans s’étonner de la pâleur qui couvre le visage d’Ermance, elle l’aide à retourner dans sa chambre ; sans se douter que le chagrin pût jamais causer tant de souffrances, elle lui prépare des calmants, des tisanes, pour dissiper le tremblement qui l’agite ; elle s’établit auprès du lit de sa cousine, et lorsqu’elle la voit plus calme, elle lui raconte en détail toutes les cures qu’elle a faites dans le village avec le simple secours des plantes qu’elle fait sécher, lui dépeint le plaisir qu’elle éprouve