XVIII
— Pourquoi trembler ainsi ? dit M. de Montvilliers en voyant entrer le lendemain chez lui sa nièce ; qu’as-tu donc à m’apprendre qui puisse le causer tant de trouble ? Ah ! quel que soit le sujet qui t’afflige, tu es sûre de l’intérêt de ton vieil ami : pourquoi paraître le craindre ?
— Oui, je le crains, répondit Ermance d’une voix tremblante, car je viens m’exposer à sa colère, à son mépris…
— Toi, mériter le mépris ! jamais je ne croirai que notre Ermance, celle dont les vertus, les heureuses qualités font le bonheur de sa famille, puisse la faire rougir !
— Ne me parlez point ainsi, reprit Ermance, avec une sorte d’égarement ; ne me rappelez point ce que j’ai perdu pour jamais, ou je n’aurai pas la force de vous rien avouer ! Cependant je n’ai plus que votre pitié au monde ; il faut qu’elle m’aide à accomplir le plus affreux devoir !
— Mon enfant, calme-toi ! dit son oncle en prenant la main brûlante d’Ermance ; la fièvre t’agite !
— Oui, la fièvre me brûle ; la fièvre du désespoir, du remords !…
— Que dites-vous ? du remords !…
— Écoutez-moi,… mais jurez avant de ne pas m’abandonner ; sinon, je ne sais à quelle extrémité je puis me porter !
— Le chagrin vous égare, Ermance, vous dont les sentiments religieux servaient de modèle à vos compagnes !
— Oui, la douleur m’égare, je le sens ; et c’est pour échapper à de nouveaux torts, à de nouveaux malheurs, que je viens vous supplier d’être mon guide, mon protecteur !
Alors remontant aux événements qui avaient précédé son mariage, elle fit le récit de tous ceux qui avaient amené sa honte, sans chercher à dissimuler aucune des circonstances qui pouvaient atténuer sa faute. En l’écoutant, le visage de M. de Montvilliers avait pris un air sévère ; ses exclamations douloureuses avaient souvent interrompu le récit de sa