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plus distinguées de l’armée ayant témoigné le regret de n’en pas être, M. de Lorency les invita, charmé de donner à son ami Chancloux le plaisir de souper avec des grands officiers de la couronne. Pendant ce temps, Auguste de Castelmont invitait des personnes d’une société fort différente, et qu’il supposait devoir jeter beaucoup plus de gaieté pendant et après le repas.

— Y penses-tu ? dit Adhémar ; inviter des femmes à un souper de régiment ?

— Eh bien, quel mal y a-t-il ? répond Auguste ; un souper n’est pas une bataille ; les femmes peuvent en être. À la guerre nous n’avons pas assez souvent l’occasion d’en rencontrer de jolies, pour manquer celle-ci.

— Mais si l’empereur vient à savoir… que moi…, un homme marié.

— Eh bien, est-ce que je ne le suis pas aussi, moi, et de sa façon encore ! Ne m’a-t-il pas dit un beau matin, comme à toi : « Colonel, vous épouserez mademoiselle C…, » et moi d’obéir ? Je ne m’en repens point, ma femme est aimable et bonne ; mais cela n’empêche pas d’en regarder d’autres.

— Au fait, répliqua M. de Lorency, celui qui décide ainsi du sort de deux personnes n’a pas le droit de leur imposer la fidélité.

— Il faut lui rendre justice, dit Auguste ; une fois le mariage conclu, il ne se mêle plus de rien. D’ailleurs n’aie pas peur qu’il s’occupe de nous aujourd’hui ; il est lui-même en train de tromper sa femme aussi bien qu’un simple colonel : mais qu’il s’en fiche ou non, il n’y a plus moyen de changer notre programme ; les invitations sont parties. Nous aurons des Viennoises ravissantes, que tu connais peut-être déjà, avec tes airs prudes ; puis nous aurons les jolies Parisiennes que la victoire attire d’ordinaire là où nous devons faire quelque séjour.

— En vérité, je crains le scandale, dit en riant Adhémar ; ces dames-là ont une fatuité qui nous jouera quelques tours… et je serais fâché qu’on sût à Paris…

— Que nous nous amusons ici ? interrompit Auguste. Ah !