Page:Nichault - Souvenirs d une vieille femme.pdf/90

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le monde, on ferait tout aussi bien d’aller se coucher.

— Il n’est pas heureux, répondit-elle ; et lorsqu’on a le sentiment de son mérite, il est difficile de se défendre d’un peu d’humeur en voyant réussir tant de gens inférieurs à soi.

— Je comprends : c’est une manière polie de nous dire que ce petit monsieur, avec son air sec et dédaigneux, vaut mieux que nous tous.

— Je ne dis pas cela ; mais…

— Vous le pensez, je gage : ces grognons soi-disant spirituels plaisent à toutes les femmes ; ce sont de jeunes ours qu’elles aiment à apprivoiser, quittes à sentir de temps en temps leurs griffes.

— Comme vous êtes méchant pour ce pauvre Isidore !

— Ah ! je ne lui fais pas grand tort, avouez-le, du moment où vous le trouvez aimable à si peu de frais ; il n’est pas facile de lui nuire dans votre esprit ; d’ailleurs je ne le peindrai jamais si maussade qu’il se montre.

— Il est humoriste, capricieux, cela est vrai ; mais, dans ses jours de bonne humeur, il cause