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barrasser par une observation trop marquée ! Cependant, la femme avec laquelle j’étais venue au bal ayant désiré voir le salon qui portait le nom de Joubert, il me fallut l’y accompagner ; les drapeaux conquis par ce brave général, et ses trophées d’armes, liés ensemble par un crêpe noir, étaient le seul ornement de cette salle où l’on n’entrait qu’avec respect. Ce deuil de la gloire, au milieu de tout le luxe des conquêtes, offrait un contraste touchant, et l’on aimait celui qui avait ordonné que cet hommage, rendu à la mémoire d’un brave, fît partie de la pompe d’une fête à la Victoire.

Malgré la foule qui remplissait le salon, il y régnait un grand silence, interrompu seulement par quelques traits de la vie du général Joubert, ou quelques brillants faits d’armes racontés par ses camarades.

— Hélas ! je l’ai vu mourir, dit un officier qui nous avait suivies. Il était trop heureux. Aimé d’une femme charmante, et qu’il adorait ; chéri de ses soldats, couvert de gloire, la mort devait le choisir. Elle ne fuit que celui qui la cherche, ajouta-t-il d’un ton de reproche.

Il me sembla que ces derniers mots s’adres-