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tout fut oublié. Je ne sais quelle certitude fixa mon imagination ; nul autre que lui ne pouvait m’observer avec un si tendre intérêt, nul autre ne pouvait m’inspirer cette sorte de confiance qui m’aurait fait aller à lui comme on aborde une ancienne connaissance ; enfin, sans me rendre compte de ce que j’éprouvais, je me sentis près de lui ; et dès lors il n’y eut plus qu’une seule personne pour moi dans cette brillante fête.

En vain M. D… s’obstinait à vouloir me conduire dans les salons qui précédaient la grande salle, pour me faire admirer avec quelle magnificence et quel bon goût ils avaient été décorés par nos premiers artistes, rien ne pouvait m’arracher de cette place où nous nous étions vus pour la première fois ; il me semblait que je ne pouvais m’éloigner sans lui causer une peine mortelle ; il me contemplait d’un air à la fois si triste et si heureux ! Il écoutait avec tant d’attention ce que je répondais d’insignifiant aux personnes qui m’adressaient la parole, et il détournait si vivement les yeux lorsque les miens se reportaient sur lui ! Combien je lui savais gré de cette crainte de me déplaire, de m’em-