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faire les honneurs du bal, sa protection devenait précieuse. Il me recommanda de me parer avec beaucoup d’élégance ; car Bonaparte voulait ramener le luxe en France, et c’est pourquoi il demandait des bals à ses ministres, quitte à y bâiller tout le temps qu’il y restait.

Je confesse n’avoir jamais mis plus de soin à ma toilette : une tunique blanche, brodée en or, une résille en perles, un bandeau de camée ; tout cela paraîtrait aujourd’hui un peu théâtral ; mais les femmes avaient alors adopté ce costume, et il était beau sans paraître ridicule.

Une des choses qui me frappèrent le plus à cette fête, ce fut la quantité de voitures qui nous condamnèrent à être trois heures à la file ; on prétend que plusieurs personnes sorties de chez elles à dix heures du soir, ne purent arriver qu’à six heures du matin chez le ministre, ce qui réjouit beaucoup le premier consul. Il est certain qu’en se rappelant que tout le monde allait à pied, peu d’années avant cette époque, il ne pouvait croire à une prospérité si rapide.

La pièce était à moitié jouée quand j’arrivai, et, malgré la place que M. D… m’avait fait garder par un de ses amis, dans la salle où était le