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sont charmantes, et elles vous amusaient assez.

— Je ne le nie point, cette aventure m’a d’abord causé un vif intérêt ; mais, vous l’avouerai-je, votre maudite prédiction en a bientôt détruit le charme. Vous avez une expérience désolante pour les cœurs à illusion, et le jour où vous m’avez prédit ce qui arrive, la peur m’a prise à tel point que je n’ai plus écrit qu’en face de ce fantôme. La contrainte se faisait sentir à chaque ligne, et je ne serais pas étonnée que ce style embarrassé n’ait fait supposer au bel inconnu que je faisais mille efforts pour lui cacher ma passion naissante. Tout cela est votre faute.

— Ceci est violent, interrompit M. de P*** en riant aux éclats. Quoi ! de confident, vous voulez me faire passer pour complice ! Ah ! je ne saurais accepter ce nouvel emploi ; c’est bien vraiment vous seule qu’il faut accuser. Si vous aviez mis un peu moins de grâce et d’esprit à consoler cet infortuné, il ne vous aurait pas fait hériter si vite de son amour pour la défunte ; mais l’entreprise était digne de vous, et vous vous deviez à vous-même de faire cet essai de vos forces. Maintenant votre conduite est toute tracée : ou ce jeune homme vous est complètement indif-