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livre le secret de mon cœur, lorsque vous savez qu’il est tout à un autre ?

— Et c’est parce que votre cœur est à La Fare malgré ses infidélités, qu’il est juste que j’aie quelque chose pour ma constance.

— La bonne extravagance ! s’écria la princesse, en tâchant de tourner la proposition en plaisanterie ; mais, mon cher duc, vous n’y pensez pas ?

— Moi, madame, je ne pense qu’à cela, et le ciel sait jusqu’où va la puissance d’une idée dont rien ne peut distraire. Au reste, que redoutez-vous en me laissant ce portrait ?

— Rien de votre probité, sans doute ; mais vous recevez tant de personnes indiscrètes… et puis La Fare a vu commencer ce portrait, il sait qu’il existe, c’était son bien… et il le redemande, dit-elle avec embarras.

— Raison de plus pour le lui rendre, reprit le duc, en s’emparant de la main de la princesse.

— Certainement ; mais vous y mettez un prix par trop ridicule.

— Ah ! si vous saviez, madame, tout ce que ce portrait est pour moi ; que d’injures, que de serments passionnés je lui adresse chaque jour ;