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cœur de la princesse de Conti : longtemps cet amour noble, délicat, combla tous les vœux de La Fare. Joindre les douceurs d’un bonheur intime à tous les avantages du rang et de la fortune, c’était trop de biens pour ce monde.

Cette union si douce devait être troublée, car elle était la satire vivante des amours éphémères qui régnaient à la cour.

La comtesse de M***, l’une de ces femmes si communes en France, dont la vanité sait prendre tous les masques, afficha tout à coup une passion violente pour M. de La Fare ; c’était une sorte de maladie de langueur ou de fureur qui lui prenait toutes les fois qu’elle était, pour ainsi dire, mordue de la rage d’enlever un mari ou un amant aux délices d’un amour fidèlement partagé. Cette soif d’un triomphe dont les pleurs d’une pauvre délaissée faisaient tout le prix, avait si bien le caractère de l’amour le plus passionné, que le moins présomptueux des hommes pouvait s’y laisser prendre. Les longs regards, les soupirs comprimés, les demi-mots… les reproches, les larmes ; enfin, toutes les séductions et tous les sacrifices, jusqu’à celui de l’amant qu’elle aimait encore ; la comtesse de M*** se