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de Conti, que son mari était contrefait, brutal, et à moitié fou ; il n’entrait jamais le soir dans la chambre à coucher de sa femme, sans être muni de deux pistolets chargés qu’il déposait sous l’oreiller nuptial, comme les garants de l’obéissance qu’il exigeait d’elle. On prétend même, qu’une nuit, fatiguée de subir cette singulière tyrannie, la princesse s’arma à son tour d’un fusil pour lui répondre, et le menaça si bien de s’en servir contre lui, qu’à dater de ce moment, il l’a laissée tranquille[1].

Le fils du poëte, l’ami de Chaulieu, le marquis de La Fare, brave, spirituel, brillant, et de ce petit nombre d’hommes qui conservaient encore quelque tradition du servage galant de la cour de Louis XIV, fut celui dont l’amour troubla le

  1. Voici comment la duchesse d’Orléans, mère du régent, parle de la jeune princesse de Conti, dont la fille, Henriette de Bourbon, fut la mère de Philippe-Égalité.

    « C’est une personne pleine d’agréments, qui joue à la beauté le tour de prouver clairement que la grâce est préférable à la beauté. Quand elle veut se faire aimer, on ne peut y résister ; elle a des manières agréables, de la douceur et point de mauvaise humeur, et dit toujours quelque chose d’obligeant. Elle n’aime point son mari, et ne saurait l’aimer : il est trop répugnant tant par son humeur contrariante que par sa figure, etc.