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d’autant plus pénibles qu’ils étaient accompagnés de tout ce qui peut en atténuer l’amertume ; c’était plutôt un avertissement qu’un soupçon jaloux ; mais il n’en fallut pas davantage pour éclairer Odille sur le danger qui la menaçait. Frédéric reçut en même temps l’aveu de l’empire qu’il exerçait et l’ordre de s’éloigner d’elle. Pour prix de son obéissance, il fallut lui permettre d’écrire, lui promettre de répondre, ce qui ne l’empêcha pas de partir désespéré.

Un an s’était écoulé depuis cette cruelle séparation, Frédéric l’avait employé à voyager en Sicile et dans les plus belles parties de l’Italie, faisant dans chaque principale ville un assez long séjour pour y recevoir une lettre d’Odille. Depuis que Venise a perdu sa splendeur, son tribunal secret et ses masques, il est d’usage de passer son carnaval à Rome : c’est une espèce de devoir imposé aux voyageurs, et qu’ils remplissent avec plaisir.

Pendant ces huit jours de saturnales, toute affaire sérieuse est suspendue ; on ne pense qu’à rire, à plaire ou à se rencontrer ; le printemps, qui commence à se faire sentir, jette, pour ainsi dire, un parfum d’amour sur toutes ces démons-