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là que Frédéric avait rencontré une jeune personne, belle, d’une famille noble, et ruinée par la guerre avec la France, une de ces créatures que le ciel destine à l’amour, et qu’on ne peut voir sans émotion.

Après quelques mots tendres, accueillis avec toute la candeur d’une âme pure, Frédéric crut pouvoir la demander en mariage, sans s’inquiéter de l’avis de sa famille. Sa demande fut bien reçue du père de la jeune Odille (c’est ainsi qu’il la nommait) ; mais, voulant savoir si les parents de Frédéric consentiraient à lui voir prendre une femme sans fortune, le père d’Odille avait écrit à ce sujet, et la réponse, insolemment dédaigneuse qu’il en avait reçue, l’avait déterminé à partir subitement pour Cologne, où il se proposait de marier sa fille à un riche négociant, depuis longtemps ami de sa famille.

Le désespoir de Frédéric, en apprenant le départ de sa bien-aimée, ne peut se comparer qu’à celui qu’il éprouva peu de temps après en apprenant qu’elle venait d’épouser M. Vander S… Cependant il feignit de vouloir s’en venger par des liaisons scandaleuses, et quand il crut tout le monde convaincu qu’il avait perdu le souvenir