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nuit, et je vis bientôt Moritz accourir vers nous. Une gourde remplie d’eau-de-vie, qui ne le quittait pas, m’aida à ranimer un instant le pauvre Olowsky, tant affaibli par les saignées ; mais il retomba bientôt dans un profond anéantissement. Son regard immobile, son pouls, dont les battements inégaux annonçaient la fièvre, me firent craindre un accès violent, et je traversai le lac en proie à des sentiments bien différents de ceux qui m’animaient quand je le passai pour aller défier un rival.

Quand nous arrivâmes aux bains de la comtesse de B…., Moritz me conjura d’accompagner les bateliers qu’il venait de réveiller pour porter le prince jusqu’à la maison, afin, disait-il, d’expliquer comment ce monsieur s’était trouvé mal ; car un semblable accident arrivé au milieu de la nuit pouvait lui susciter quelque mauvaise affaire. J’étais fort embarrassé de donner un motif raisonnable à ma rencontre avec le prince ; j’imaginai une partie de pêche aux flambeaux, pendant laquelle il se serait évanoui. Enfin, comme je lui donnais des soins fort empressés, M. de S…, le médecin qui se trouvait chez la comtesse B…, crut facilement à mon récit, et