Page:Nichault - Souvenirs d une vieille femme.pdf/220

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Moi, déshonorer la femme la plus pure ! m’écriai-je hors de moi ; rétractez cette parole infâme avant que j’en tire vengeance, rétractez-la, vous dis-je. En prononçant ces mots, tremblant de rage, ma main se cramponnait au bras d’Olowsky, comme la serre d’un vautour au flanc de sa proie.

— Non, reprit-il avec colère, un amant seul peut s’égarer au point de me parler de la sorte ; nul autre ne serait assez imprudent pour la perdre ; c’est donc pour un rival qu’elle me repousse. Sa terreur est une feinte, sa vertu, un mensonge ; elle se riait avec lui de mes regrets, de mon malheur… ah ! cette pensée me rend à toute ma fureur ; défendez-vous, misérable !

— Et, si j’étais son frère ! m’écriai-je, dans la honte et le remords d’attirer le mépris sur Alexine.

— Son frère, répéta-t-il en jetant au loin son épée, ah ! maudit soit l’affreux sentiment qui m’a fait l’outrager ! moi, le bourreau de sa sœur ! j’allais tremper cette épée dans son sang… ah ! pardon ! pardon ! criait le malheureux prince, en pressant mes genoux ; pardon pour cet amour qui a troublé ma raison ; pour cette ivresse du cœur, ce moment horrible qui me voue aux re-