Page:Nichault - Souvenirs d une vieille femme.pdf/215

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rendu plus heureux que cette lettre écrite pour m’ôter tout espoir ; il me semblait que ce frère dont Alexine attendait protection contre l’autorité d’un mari insensé, devait naturellement être de mon parti, et accueillir tous les moyens que je rassemblais dans ma tête, pour faire casser le mariage de sa sœur ; car ce mariage, scellé par un assassinat, était nul devant Dieu, et devait l’être devant les hommes.

Passant de l’espoir aux convictions les plus folles, j’allai jusqu’à me croire la puissance de volonté qu’Alexine me supposait ; ce n’était plus au télescope que je devais de connaître ses actions et les pensées qui en naissaient naturellement ; je me sentais doué de cette seconde vue qui défie l’ombre et l’espace ; je voyais battre son cœur ; j’entendais les soupirs qu’exhalait sa poitrine oppressée ; ses craintes, ses désirs, ses combats, ses remords ; je les suivais d’un œil avide, comme le joueur passionné étudie les chances du sort, et suit des yeux le roulement de cet or qui doit assurer sa fortune.

Enfin, je me croyais tel que mon imagination m’avait créé, et, dans cette confiance de mon pouvoir surnaturel, l’impossible n’était plus