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comtesse expliquait tout. Mais pouvais-je m’éloigner d’Alexine, quand ce malheur la privait de son appui dans un pays étranger, et peut-être de la seule protection qu’elle eût contre l’autorité d’un fou furieux ? Non, dis-je, le ciel ne m’a inspiré un amour si déraisonnable, en apparence, que pour le salut d’un être faible, innocent, et dont la vie, sans cesse menacée, réclame mon secours. Je ne l’abandonnerai pas ; mes conseils, mon bras, ma fortune, ma vie, j’emploierai tout pour la délivrer d’un joug terrible. Ah ! ces faiblesses de l’âme, ces mouvements du cœur qu’on ne peut réprimer, c’est le secret de Dieu.

J’étais venu dans le belvédère pour y faire mes adieux à Alexine ; je voulais qu’un dernier mot écrit, en regardant par intervalle son habitation, lui peignît ce que cette vue m’avait causé de trouble, et mes regrets de voir payer un amour si désintéressé par un dédain cruel. Mais, au lieu de reproches, de plaintes et d’adieux, j’écrivis :

« Ce deuil qui vous accable, cette mort qui vous soustrait à une autorité chérie, ne vous livrent-ils point à celle que vous avez tant de