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tante, prétend qu’il ne reste plus de sa blessure qu’une grande faiblesse, et une terreur telle, qu’elle s’évanouit au moindre souvenir qui lui rappelle son assassin. Elle a pensé mourir l’autre jour, à ce que dit le docteur C…, en recevant la nouvelle que le prince était guéri de sa démence, et qu’il serait bientôt en état de se mettre en route pour venir la rejoindre.

— Et l’on souffrirait, m’écriai-je, qu’elle retombât au pouvoir de ce fou furieux !

— Que voulez-vous ! elle est sa femme, répondit M. de Bonst… ; et si les gens de l’art affirment l’avoir guéri, il faudra bien…

— Jamais ! jamais ! repliquai-je avec feu. On sait ce que c’est qu’un fou guéri ; c’est un malade affaibli par les saignées, qui n’attend que le retour de ses forces pour retomber dans ses accès. L’assassinat est sa monomanie ; s’il la revoit, il la tuera, vous dis-je. Je n’en veux pour preuve que la terreur qu’il lui inspire : cette terreur est un avis du ciel.

— En vérité, je crois que rien que d’en parler, le mal se gagne, dit Albert ; car te voilà dans une fureur inconcevable.

En effet, j’étais hors de moi ; ce que je venais