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de son devoir d’en parler au père de la jeune fiancée ; mais celui-ci prétendit reconnaître sa propre jeunesse dans ces sortes d’extravagances, et le mariage n’en fut pas différé d’un jour. Celui fixé pour la célébration, les gens du prince l’entendirent faire des menaces étranges : l’un d’eux l’avait vu saisir, avec un geste théâtral, le poignard turc qui faisait partie d’un faisceau d’armes suspendu près de son lit ; un autre l’avait entendu proférer ces mots à voix basse, et d’un air égaré :

— Je l’empêcherai bien de jamais me trahir !

Enfin, tous se reprochaient de n’avoir point prévu que ces actes de déraison pouvaient le conduire à quelque autre plus funeste. Après le coup de poignard, il fut reconnu, par tous les médecins, que le prince était dans un état complet d’aliénation : on le conduisit chez le docteur le plus renommé pour la guérison de cette affreuse maladie ; la jeune princesse a été depuis confiée aux soins de sa tante ; et c’est pour la rétablir des suites de cet affreux événement qu’on lui a ordonné de voyager en Suisse. Le docteur C…, qui vient d’être appelé en consultation près d’elle, avec le médecin russe de sa