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— D’où viens-tu donc si tard, Enguerrand ? me dit alors une voix que je reconnus pour être celle de mon cousin. Nous t’attendons depuis une heure pour nous mettre à table. Ma tante commençait à s’inquiéter ; elle prétend que tu es depuis quelque temps triste, rêveur ; elle a peur que tu ne sois malade d’ennui ; car, il faut l’avouer, la vie que nous menons ici n’est pas fort divertissante.

Je ne pus entendre ces mots sans éprouver une sorte de remords. Inquiéter ma mère pour une cause semblable, c’était un tort sans excuse ; et je me promis d’employer ma raison à chasser une image qui exerçait sur moi un tel empire. Ma longue absence avait tourmenté ma mère ; je n’aspirai plus qu’à me faire pardonner, en lui consacrant mes soins et ma pensée entière. En effet, j’étais tout à elle, lorsque Albert me dit :

— Sais-tu ce que nous avons fait ce matin, pendant que tu courais la campagne ? Nous sommes montés tous trois au belvédère, et nous avons découvert, grâce au télescope, une petite scène fort dramatique qui s’est passée dans le château Byron, ainsi qu’on l’appelle ici.