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celui de la nièce, je me rendis à la poste à l’heure du courrier ; c’est le moment où les domestiques de tous les étrangers viennent prendre les lettres adressées à leurs maîtres. J’eus bientôt reconnu parmi eux celui qui recevait chaque matin les ordres de l’adorable nièce : un coup d’œil jeté sur une des lettres que le directeur lui donnait, et que le soin de chercher de quoi payer le port l’empêcha de prendre tout de suite, m’apprit qu’elle se nommait la princesse Alexine Olowska.

Elle est donc mariée ? pensai-je avec regret ; puis, me rappelant qu’il était d’usage en Russie de joindre le titre de la famille au nom des jeunes personnes, je rentrai avec plaisir dans mon incertitude.

Alexine ! répétai-je, que ce nom me plaît ; que je suis heureux de le savoir ! Enfin je pourrai donc lui parler, l’accuser de ma folie ; car ce sentiment, qui me préoccupe à tous les instants du jour, ces battements de cœur que j’éprouve lorsque je l’aperçois à une lieue de distance, ma profonde douleur quand je la vois pleurer, tout cela est de la démence ; qu’en peut-il résulter ? saura-t-elle jamais ?…