Page:Nichault - Souvenirs d une vieille femme.pdf/142

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Faut-il l’avouer ? je ne pus l’entendre sans rire, et ce rire, quoique aussitôt comprimé, remplit de grosses larmes les yeux de mademoiselle Denneville.

— Vous êtes institutrice, vous, Anaïs ?

— Ah ! je le vois, reprit-elle d’un ton amer, le sort est implacable ; le repentir, le courage, les sacrifices, rien ne le touche.

— Par grâce, calmez-vous, lui dis-je en la voyant près de se trahir ; ne craignez rien de moi ; je vous jure… sur l’honneur. Jamais on ne saura… Quand pourrai-je vous parler ?

— Demain, de grand matin, près de la terrasse qui borde le Gange.

À peine ces mots finissaient, que la maîtresse de la maison ayant donné le signal, les femmes se retirèrent ; alors les hommes se mirent à boire, à politiquer, et moi je rêvai, en buvant comme les autres, au singulier hasard qui me faisait rencontrer dans l’institutrice des filles de lord Wel…, ma dernière intimité parisienne ; car vous avez déjà deviné que cette miss Denneville, ajouta M. de L…, n’était autre que la personne charmante qui m’avait coûté tant de louis.

Ma première idée fut que lord Wel…, séduit