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valet de chambre de venir me chercher le lendemain de grand matin ; car je n’avais pas de temps à perdre pour me rendre au Havre, le bâtiment devant mettre à la voile dans les vingt-quatre heures. C’est encore hébété des suites de cette élégante débauche, que je me suis mis en route, n’en gardant d’autre souvenir que le vide énorme qu’elle avait laissé dans ma bourse.

Après avoir passé un an dans ma famille, à l’île Bourbon, je témoignai le désir de profiter du voisinage pour faire un petit voyage dans l’Inde : mon père y consentit. Il avait d’anciens amis à Calcutta, auxquels il me recommanda, en les autorisant à me compter les sommes nécessaires à ma dépense ; car son orgueil paternel voulait que j’eusse de quoi briller dans un pays où lui-même avait eu des succès dans sa jeunesse.

Je partis la joie dans l’âme, car j’allais voir un pays enchanteur, des bramines et des bayadères !

Arrivé à Calcutta, je fus assez déconcerté de n’y rencontrer que des Anglais : les amis de mon père, lancés dans la meilleure compagnie de la ville, me conduisaient chaque jour à des dîners