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— Et le vôtre où donc est-il, ma mère ? demanda Angéline.

— Il n’est point ici, répondit tristement madame Vandermont ; c’est un sacrifice que je m’impose avec courage aujourd’hui, parce qu’il est volontaire, et que si l’on venait plus tard à m’y contraindre, j’en mourrais de douleur. Mais, ne me plaignez pas, mes enfants, je me suis mise à l’abri du seul malheur contre lequel je serais sans force. Vous m’aimerez, vous me soignerez ; car je serai non-seulement pour vous un appui, mais encore une espérance.

» Cette fortune que je vous ai cachée, pour mieux assurer votre bonheur à tous, est le fruit d’un coup de désespoir. Ayant à peine de quoi vous élever avec le peu que je possédais à la mort de votre père, il me vint à l’idée de consacrer une partie de mon écrin à tenter le sort : on venait de mettre à Vienne une terre de deux millions en loterie. C’est l’ami Brécourt que je chargeai de faire l’acquisition de mes billets, sous son nom ; il a la main heureuse, j’ai gagné la terre ; et, depuis dix ans que je la possède, grâce aux soins de mon unique confident, de M. de Brécourt, les revenus en ont considérablement