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» Quelle excellente proposition ! et combien je regrettai qu’elle n’eût pas été faite plus tôt.

» On sonne la gouvernante. Les voilà partis, Dieu soit loué !

» Mais ils n’ont consenti à s’éloigner que les mains pleines de bonbons ; et nous sommes destinés à en retrouver des traces sur tous les meubles qu’ils vont poisser.

» Ne pouvant rien contre ce qui m’arrive, je veux prendre mon parti, et m’en consoler en faisant un peu ma cour à madame Derfeuil, qui, à part ses défauts, est aimable et jolie : je lui parle d’elle, de l’extrême désir que j’avais depuis longtemps de lui être présenté ; j’invoque le souvenir d’une de mes sœurs qui a été élevée avec elle ; enfin j’attaque son esprit, son cœur, son amour-propre, sans en être un instant écouté. Ce n’est ni le dédain ni la pruderie qui l’empêchent de me répondre ; mais ses oreilles sont entièrement captivées par le bruit qui se fait dans le salon, par la voix de la bonne qui commande vainement l’obéissance, et par celles des enfants qui parlent, chantent ou crient à la fois. L’expression de sa figure change à chaque nature de cris ; une inquiétude invincible la