Page:Nichault - Physiologie du ridicule.pdf/56

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Derfeuil la permission de dîner en uniforme, ainsi j’avais des bas de soie. Ma foi, l’idée de l’effet qu’allait produire cette traînée de chocolat sur ma chaussure me fit perdre patience ; j’allongeai un bon coup de pied à l’invulnérable Achille, qui se mit à braire de toute sa force.

» — Il se sera heurté contre le pied de la table, dit M. Derfeuil en se baissant et en soulevant la nappe. Que vas-tu faire là-dessous, petit gamin ? Allons, viens ; est-ce à la tête que tu t’es frappé ?

» — Eh non ! beuglait l’enfant en portant la main derrière lui ; c’est un pied… qui… m’a…

» — Oui, oui ; je comprends, c’est le pied de la table ; aussi pourquoi vas-tu jouer avec les roulettes : tu ne peux pas rester un moment tranquille. Tiens, prends ce biscuit, et va-t’en dans le salon.

» À la vue du biscuit, la colère d’Achille s’apaise. La mienne s’augmente à la pensée d’être obligé de rentrer chez moi pour changer de bas ; car il n’était pas possible de dissimuler une tache du genre de celle que je devais avoir.

» — Je crois qu’ils ont assez mangé, dit alors M. Derfeuil à sa femme, et que vous ferez bien de les envoyer avec leur bonne.