Page:Nichault - Physiologie du ridicule.pdf/36

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sans façon du dimanche, assez patients pour attendre leur tour, ne peut se faire à se voir enlever le contenu de son plateau avant d’avoir eu le temps de le présenter aux premières autorités du cercle. Ce pillage, imité de haut lieu, le met en colère ; il murmure des mots peu flatteurs pour les affamés, et retourne à la provision en marchant sur les pieds de tout le monde, et en maudissant la manie d’inviter plus de gens qu’on n’en peut désaltérer.

Cependant ses maîtres ont de l’argent et sont fort honorables ; ils n’ont rien épargné pour les rafraîchissements ; ils ont même pensé à avoir un farceur de profession, pour amuser le raout par quelques scènes de paravent ; mais le malheureux n’a point d’espace pour se remuer : étouffé par la foule qui remplit le salon, étourdi par celle qui reflue dans la chambre à coucher, et qui, désespérant de rien entendre des scènes du ventriloque, cause d’une manière bruyante, il perd la tête et oublie de faire rire.

Là, pas plus d’amour que chez les grands de la ville : ce sont des vanités qui s’agitent en tout sens, des femmes qui se disputent les regards, les phrases arrangées du plus dédaigneux des com-