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III


Madame de Raiseville n’est plus jeune, elle n’a jamais été jolie, mais un teint coloré et de beaux cheveux blonds servent de prétexte à ses flatteurs, et lui donnent le droit de se croire agréable. Élevée, non dans l’amour, mais dans la spéculation des arts, elle est parvenue, à coups de leçons, de méthode et d’imitation, à une sorte de talent en musique ; elle joue Beethoven, chante Rossini, et fait danser au piano tout un bal improvisé. Qu’importe que Beethoven soit joué sans style, Rossini chanté sans âme, et les contredanses exécutées sans mesure ; cela ne compte pas moins pour une trinité de talents, dont le plus chétif est encore un titre à la satisfaction personnelle.

Pour faire valoir tant d’avantages, madame de Raiseville a de la fortune, un mari en crédit et des loges à plusieurs de nos théâtres ; aussi n’est-elle jamais seule : on lui fait une visite le matin