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fois qu’il fixait les siens sur elle ; cependant, elle ne manquait jamais à le mettre de toutes les parties où elle faisait inviter son ami, et paraissait attacher en toute occasion un grand prix à son suffrage.

Agenor, dont le bon cœur et la présomption naturelle n’avaient jamais redouté les succès de Théophile, s’étonna de l’espèce de froideur établie sans motif entre son ami et madame de Vardennes ; quelque chose l’avertit qu’il devait en être jaloux, et dès lors il résolut de se mettre en garde contre le malheur d’une rivalité semblable : quand il y va de la perte d’une maîtresse ou d’un ami, et quelquefois des deux, les moyens extrêmes sont permis.

Après avoir longuement réfléchi sur le meilleur parti à prendre dans cette conjoncture, Agenor s’arrêta au plus étrange.

Calomnier son ami auprès de madame de Vardennes, le faire passer pour avare, hypocrite ou jaloux à l’excès, c’était une méchanceté indigne du caractère d’Agenor ; nier les agréments de Théophile, montrer ses qualités sous un jour défavorable, c’eût été plus mal encore : comment donc faire pour le perdre dans l’imagination