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tipliait les poses pour prolonger le plaisir d’être ainsi promenée ! Ces moments d’arrêt, où elle déployait si bien ses vieilles grâces et sa puissance, n’étaient pas tous perdus pour Polydore ; il trouvait toujours moyen de glisser quelques mots, de lancer une œillade aux jolies femmes qui passaient près d’eux. C’est ainsi qu’en entendant parler derrière lui madame de Tourval, il se pencha pour lui dire à l’oreille : « Vous l’aurez. » Elle comprit aussitôt qu’il s’agissait d’un billet d’invitation arraché à madame de Freneuil, et le sourire le plus reconnaissant répondit à cet avis furtif ; les yeux de Polydore en rayonnèrent de joie, et la vieille madame de Freneuil prit cet air joyeux pour l’effet de ses bontés, et de la satisfaction d’amour-propre qu’éprouve tout jeune homme qui peut se dire :

— Cette femme va donner une fête, et j’en serai le héros.

Il y avait peut-être un peu de ce sentiment-là dans ce qu’éprouvait Polydore ; les cœurs des fashionables sont sujets à ces sortes de petitesses.

Décorateurs, tapissiers, symphonistes, glaciers, fleuristes, cuisiniers, tout fut mis à contribution pour cette soirée, moitié concert et moitié bal,