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à qui la verra de près et pourra lui adresser le tribut de son admiration ; le projet de ce concert, auquel doivent concourir les plus grandes illustrations musicales, attire de toutes parts un nombre infini d’invitations, de cajoleries, de sollicitations à madame de Freneuil. Ceux qui rient le plus de ses ridicules sont les plus empressés à se faire inviter ; entre-t-elle dans un raout, il se forme aussitôt un cercle autour d’elle, on demande des nouvelles de sa santé avec l’accent du plus vif intérêt. Les femmes vantent le bon goût de sa toque chamarrée d’or, et veulent en avoir une pareille au prochain bal ; les hommes se disputent l’honneur de lui donner le bras pour parcourir les salons et la galerie de fleurs. Ils écoutent de la meilleure grâce ses grosses épigrammes sur la perfidie des hommes ; ils sourient à ses mauvais bons mots, et se consacrent si complétement à elle tant que le raout dure, qu’elle doit se croire l’objet d’une préférence exclusive. Tant de soins lui font craindre que Polydore ne soit jaloux. Elle lui fait signe de venir auprès d’elle ; mais Polydore, tout occupé de séduire l’esprit d’une jolie coquette, ne pense pas à madame de Freneuil ; loin d’être blessée de cette impolitesse ;