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— Restez donc, dit-il. À bas, goulu d’Azor ! Veux-tu bien la laisser manger ! Gredin, voleur ! attends-moi, je t’apprendrai à lui mordre l’oreille ! c’est que je ne badine pas, moi !

Et pendant que M. Canophile s’escrime en injures, en gestes et en menaces pour séparer les combattants, le négociant gagne la porte ; il est déjà dans son cabriolet.

— Il est parti !… Ma foi, tant pis pour lui ! dit Canophile ; puisqu’il est si impatient, je ne regrette point l’affaire qu’il allait sans doute me proposer. Je n’aime pas à traiter avec les gens qui détestent les chiens ; ils ont l’esprit et le cœur secs.

— Cet homme est aussi par trop ridicule avec ses chiens, disait le négociant en étant les poils dont son pantalon noir était parsemé. Conçoit-on une manie semblable ? Et l’on m’avait recommandé à lui comme à l’homme le plus capable et le plus obligeant ? Eh ! qui pourrait jamais rien en tirer à travers ses histoires de chiens et les aboiements de sa meute ?

En effet, M. Canophile est le meilleur, et surtout le plus généreux des hommes ; mais il a beaucoup vécu dans le monde, il en a longtemps