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Maintenon, ornée des larges manches du moyen âge ; demandez à cette poupée, habillée de toutes pièces et de tous siècles, si elle n’est pas cent fois plus heureuse, plus ravie d’elle-même que cette jeune personne assise à quelques pas de là, dont les beaux cheveux relevés simplement à l’air de sa physionomie, la robe blanche, la tournure élégante, l’attitude modeste et gracieuse, plaisent sans doute, mais ne se font pas remarquer ? Les danseurs passent devant elle sans l’apercevoir, tant leurs regards sont frappés de l’étrangeté d’une parure qui a mis à contribution tous les genres, toutes les époques et toutes les couleurs ! La pauvre enfant voit les contredanses se succéder, et personne ne vient l’inviter : ainsi délaissée, elle se croit laide ; elle en veut à sa mère de lui interdire les guirlandes dorées, les marabouts roses, les robes archidécolletées, enfin tout ce qui saute aux yeux des danseurs blasés ; elle donnerait une année de son innocente vie pour un quart d’heure d’enivrement pareil à celui qui brille dans les regards de la valseuse moitié grecque et moitié châtelaine.

Eh bien, depuis cette innocente créature jusqu’au brave député qui écoute l’orateur sans