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on s’agite pour faire croire qu’on s’amuse, on se donne l’apparence d’un triomphe quand on dévore une humiliation ; enfin, on est plus ou moins torturé par mille petits supplices d’amour-propre, qui font de ces bals pompeux des soirées et des nuits fort tristes.

C’est surtout quand les premiers rayons du jour glissent à travers les volets et font pâlir les lustres, quand la fatigue se mêle à la tristesse d’un plaisir qui s’éteint, qu’on s’aperçoit du vide ou du trouble que ce plaisir laisse dans l’âme. Madame de Rochebelle venait enfin de recevoir les adieux reconnaissants des derniers danseurs de son bal ; elle se retrouvait seule dans ses salons, où les meubles épars, les arbustes, les fleurs saupoudrées de poussière, témoignaient encore de la foule et du mouvement qui avaient prolongé la fête.

Ce moment de calme après le bruit est ordinairement consacré à la récapitulation des sensations qu’on a éprouvées pendant la soirée. On se demande si l’on n’a pas trop écouté ou trop dit, et il se passe alors un petit combat entre la bonne foi du cœur et la ruse de l’esprit, dont la victoire reste longtemps incertaine. Le souvenir d’un mot