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bornent là leur dévouement. Riches en souvenirs d’intrigues, ils savent le sort de tant de maris qu’ils n’ont pas envie de s’y exposer ; et pourtant, ces maris sont moins à plaindre qu’eux ; ils n’en sont pas réduits à payer une maîtresse pour n’être point seuls, et ne fussent-ils entourés que des enfants de leur femme, ils sont sûrs d’être soignés, chéris, pendant leur vieillesse, et pleurés à leur mort.

Dans ce siècle de liberté, ce qui rend nos fêtes plus brillantes qu’amusantes, c’est le peu de cordialité qui y règne ; on ne s’y donne même plus la peine de cacher sa malveillance, elle se lit dans tous les regards. Qu’une femme soit belle ou non, elle se sent sous le joug d’une observation ennemie, également sévère pour ses agréments ou pour ses défauts. Les plus courageuses se révoltent contre l’impression désagréable qui naît de cette certitude, et prennent les airs d’une gaieté que démentent leurs éclats de rire forcés et leurs yeux inquiets ; car elles les portent malgré elles du côté d’où partent les traits qu’elles redoutent. Alors, se venger de la malveillance en cherchant un moyen d’exciter le dépit, l’envie, devient l’arrière-pensée générale ;