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merveille, et puis le mari est si amusant avec sa sotte confiance et ses grosses plaisanteries sur les maris trompés. Ah ! celui-là n’est pas jaloux, vous en conviendrez.

— Ce qui ne l’empêche pas d’être fort ridicule, dit la marquise d’Orbesson. Son aveuglement est aussi par trop fort, et l’on serait tenté de le croire volontaire, si le pauvre homme avait quelque chose à gagner à l’intimité de M. d’Aulerive ; mais le colonel n’a qu’un beau nom sans fortune, sans crédit, et M. Menival ne fait cas que de ses millions. Je ne crois pas qu’il ait jamais lu quatre pages d’histoire de France ; vous descendriez en droite ligne de Pharamond, qu’il n’en aurait pas plus de considération pour vous. Aussi rien n’explique l’excès de complaisance qui lui fait jouer un rôle si misérable : vraiment, j’en ai quelquefois pitié.

— De la pitié pour ce bon gros Menival, s’écria madame de Verrières ; mais il est le plus heureux homme que je connaisse. Toujours content de lui, jamais d’humeur, se trouvant adorable, se croyant adoré, certain que l’argent donne tout, l’esprit, la grâce, le bon ton ; qu’un millionnaire est un dieu qu’on encense de toutes parts, qu’une