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mademoiselle de la Sorbière ? En vérité, je ne sais pas ce qu’elle y gagnerait.

— Et moi, je le sais bien. Pensez-vous qu’avec toutes ses vertus domestiques, ses talents, que vos vieux amis seuls connaissent ; ce visage charmant qu’on ne voit que sous un voile à la messe ; cette taille élégante qui se montre tout au plus deux ou trois fois par hiver dans quelques bals intimes, votre fille trouvera un mari ? Ah ! je vous réponds bien qu’il ne viendra pas à l’idée d’aucun de nos jeunes gens de venir la chercher dans cette famille dont elle fait le charme. Il la rencontrerait souvent même dans les réunions dont les jeunes personnes font le premier ornement, qu’il n’y prendrait pas garde. Cependant elle serait une des plus jolies du bal, cela n’est pas douteux ; mais comme elle s’effacerait pour laisser briller les autres, on ne la remarquerait point, et peut-être bien la ramèneriez-vous les larmes aux yeux et confuse de l’humiliation de n’avoir pas été invitée une seule fois à danser.

— Si je pouvais prévoir un semblable affront, je ne la mènerais au bal de ma vie.

— Beau moyen ! Faites en sorte qu’elle y aille plutôt dix fois qu’une ; mais inspirez-lui le désir