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chambre ; je voulais donner à ce petit bal l’air d’un impromptu. Je savais que la reine d’Angleterre désirait beaucoup voir danser le roi, et que la jeune princesse, sa fille, serait fort contente d’avoir cette occasion de danser elle-même ; mais, au lieu d’aller l’inviter, comme c’était son devoir, le roi va prendre la main de madame de Mercœur, et cela pour se faire un droit d’inviter aussitôt après mademoiselle de Mancini[1] ; car son empressement pour madame de Mercœur n’est qu’un détour pour cacher la préférence qu’il accorde à sa sœur, et, je l’avoue, malgré l’innocence de ce beau sentiment pour Olympe Mancini, il commence à m’inquiéter.

— Rassurez-vous, madame, la leçon que le roi a reçue hier a paru lui faire une vive impression, et je répondrais bien…

— Vraiment je suis désespérée de n’avoir pu modérer ma colère, et de lui avoir arraché ainsi la main de madame de Mercœur, en lui disant d’aller inviter la princesse Henriette ; car la pauvre enfant, également humiliée de l’oubli du roi et de mon acte d’autorité, n’a plus voulu danser. Elle a feint d’avoir mal aux pieds, et je l’ai vue porter sur sa mère des yeux pleins de larmes. Eh bien, savez-vous ce que le roi m’a répondu, lorsque, le bal fini, je lui ai reproché sa conduite ? Il m’a dit qu’il n’aimait pas les petites filles… Parce qu’il a dix-huit ans et qu’il paraît en avoir vingt, il

  1. Le cardinal de Mazarin ayant fait naturaliser française sa famille, mesdemoiselles Mancini, ses nièces, furent dès lors appelées mesdedmoiselles de Mancini, ainsi qu’on peut le voir dans la Gazette de 1657, dans les mémoires de mademoiselle de Montpensier, et dans ceux de madame de Motteville, qui nomment toujours Marie, mademoiselle de Mancini.