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brassa tendrement comme pour s’excuser de n’avoir pas reçu ses adieux, de n’avoir pas prévu en les refusant qu’il était possible qu’un malheur les séparât pour toujours, et qu’alors Alfred emporterait au tombeau le souvenir de son ressentiment sans y mêler celui de sa tendresse.

Ce moment fut entièrement consacré au bonheur de se revoir et au récit des exploits et des souffrances d’Alfred. Ma tante ne se lassait point de raconter des détails si intéressants pour son amour maternel ; mais, tout en l’écoutant attentivement, mes yeux se portaient souvent sur son fils qui, n’osant point l’interrompre et voulant me parler, portait à ses lèvres l’anneau qu’il tenait de moi. Combien j’étais heureuse alors ! Il me semblait impossible que mon père ne fût pas touché de notre émotion, et qu’il ne fût pas surtout bien convaincu qu’en s’opposant plus longtemps à nos vœux, il nous affligerait sans triompher de notre constance. En effet, je devinai assez juste ; après avoir entendu répéter dix fois à ma tante les détails de l’affaire où son fils avait été blessé, et ceux de la cure miraculeuse du