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La baronne se chargea de répondre, et soutint à elle seule l’entretien tant que dura la visite. Mathilde, absorbée dans ses réflexions, se contentait de paraître approuver ce que chacun disait, sans pouvoir s’astreindre à l’écouter. Enfin elle quitta le maréchal pour se rendre chez madame de Méran. Le concert était commencé ; craignant de l’interrompre, Mathilde s’assit dans le salon qui précédait celui où l’on chantait. Elle espérait pouvoir y rester toute la soirée, et se soustraire ainsi aux regards curieux. Mais M. de Méran, ayant appris qu’elle était arrivée, s’empressa de venir lui donner la main pour l’aider à franchir la foule d’amateurs qui remplissait la salle, et la conduire à la place qui lui était réservée entre deux vieilles duchesses.

Elle l’aurait bien dispensé de cet honneur qui l’exposait à entendre, en passant, ce que l’on disait d’elle, de sa toilette et de sa pâleur, dont chacun prétendait expliquer la cause. Enfin la musique recommença, sans qu’on s’en aperçut autrement qu’au soin que prenaient les bavards de chuchoter au lieu de parler à voix haute, et qu’à l’analyse profonde que les femmes faisaient de leur parure, tout en applaudissant froidement aux roulades de la cantatrice ; cependant quelques personnes, réellement émues par les accents de la voix de madame M…, par son talent à la fois si gracieux et si dramatique, donnèrent des signes d’un enthousiasme qui devint bientôt général. Mathilde