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le matin même chez la baronne d’Ostange, Mathilde se décida à ne point sortir de la journée, dans l’espérance que le colonel Andermont viendrait le soir, et qu’elle apprendrait de lui la vérité sur l’état de son ami. Mais elle l’attendit vainement ; deux jours se passèrent à chercher les raisons qui pouvaient le retenir, et la véritable se présentait souvent à l’esprit de Mathilde : il est si naturel de supposer ce qu’on redoute ! Mais elle ne pouvait concevoir le motif qui engageait M. de Varèze ou ses amis à lui cacher qu’il s’était trouvé mal après avoir eu l’imprudence de sortir. Elle s’offensa d’un ménagement qui semblait annoncer l’intérêt particulier qu’on lui supposait pour lui ; et tandis qu’Albéric l’accusait d’insensibilité, elle se faisait le reproche d’avoir trop mal dissimulé sa faiblesse. Dans l’incertitude qui la tourmente, elle propose à sa tante d’aller voir le maréchal de Lovano ; elle lui prouve que c’est un véritable devoir que de tenir compagnie à un ami goutteux, et puis il leur saura tant de gré de cette preuve d’amitié ! La baronne approuve ce projet charitable, sans deviner le motif qui l’a fait naître ; mais comment l’arranger avec le concert de madame de Méran ? rien de plus facile. Mathilde prétend que les premiers morceaux d’un concert étant presque toujours sacrifiés au bruit que font les gens qui arrivent, on ne perd rien à ne les pas entendre, et elle décide que la soirée se partagera entre un ami souffrant et une réunion brillante.