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» — Croyez, monsieur, que si je ris à tort de beaucoup de choses, je sais respecter la vie d’un galant homme.

J’avais vu la balle traverser le bras d’Albéric. J’étais certain que sa blessure était grave, quoiqu’il en parlât fort légèrement. J’ai fait approcher le chirurgien ; bientôt après, nous avons transporté Albéric dans sa voiture, car la douleur et la perte de son sang l’empêchaient de se soutenir. Mais c’est bien mal à moi de vous donner tous ces détails dont je vous vois pâlir. Madame, nous sommes tellement familiarisés avec ces sortes d’accidents, que nous oublions souvent qu’ils sont très-pénibles à entendre raconter. Enfin, tout s’est fort bien passé ; M. de Marigny est content, et sans l’obligation de rester prisonnier chez lui quelques jours, Albéric ne se plaindrait pas. Mais il brave moins courageusement l’ennui que les coups de feu : c’est pour cela qu’il vous supplie de lui prêter quelques livres pour charmer sa détention. Choisis par vous, madame, il est certain de les trouver intéressants.

Il était facile de deviner qu’en s’acquitant de cette commission, Maurice remplissait un devoir pénible. Albéric avait senti le besoin de se confier à lui avant de s’exposer à la mort.

— Si je ne dois plus la revoir, avait-il dit, promets-moi de lui apprendre qu’elle a perdu l’homme qui l’appréciait le mieux et qui l’aurait le plus aimée ; elle me croit frivole, inconséquent, inaccessible à tout sen-