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ples, il se proposait de passer en Sicile, lorsqu’une imprudence lui coûta la vie. Il dessinait parfaitement, et la mère de Mathilde, en interdisant toute correspondance entre lui et sa fille, n’avait pas poussé la rigueur jusqu’à l’empêcher de lui envoyer les dessins qu’il faisait des sites les plus intéressants ; et l’impatience d’achever celui qu’il avait commencé près du golfe de Baïa lui avait fait oublier le danger de rester trop tard dans cet élysée célébré par Virgile, où l’on respire la mort dans un air embaumé : le tremblement qui suit la fièvre l’avertit cependant de la nécessité de revenir à Naples, où il espérait que le changement d’air le guérirait. Mais il n’était plus temps ; et la fièvre étant devenue inflammatoire, Alfred avait succombé le troisième jour de cette terrible maladie, malgré tous les secours de l’art.

Ainsi Mathilde débuta dans la vie par la perte de ce qu’elle aimait le plus au monde. Sa douleur était légitime ; elle ne la cacha point. Le désespoir du duc de Lisieux pouvait seul lui être comparé ; il s’y joignait de plus les reproches qu’il se faisait d’avoir contraint son fils à la quitter pour aller trouver la mort en Italie. Dans l’excès de sa peine, il écrivit à Mathilde qu’il ne pouvait espérer de consolation qu’en pleurant avec elle sur leur commun malheur ; elle obtint de sa mère de le recevoir, et pendant la longue maladie qui la mit aux portes du tombeau, le duc de Lisieux lui prodigua de si tendres soins, qu’elle s’efforça de vivre