Page:Nichault - Le Moqueur amoureux.djvu/248

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

promit d’être prêt le lendemain à l’heure du départ de ces dames.

— Vous étiez avec le brave Philippe, dit le prieur à madame de Lisieux, celui que nous appelons le pélerin de la grande armée. Depuis que son général repose parmi nous, il est venu bien des fois le bénir, et raconter sa mort aux hôtes de l’hospice. Ses récifs amusent nos jeunes frères, car vous pouvez remarquer, ajouta-t-il, qu’excepté moi, qui ai trente-cinq ans, et qui ai résisté la moitié de ma vie à la rigueur de ce climat, personne ici n’a passé l’âge de l’extrême jeunesse. La plupart de ceux que la religion nous amène sont bientôt forcés, sous peine de mourir de la poitrine, de redescendre dans les vallées, où l’air est moins meurtrier. Les plus zélés sont les plus vivement atteints, et il est rare que les frères qui me suivent dans nos campagnes d’hiver en soient à leur troisième. Quand il faut, au milieu de la nuit, courir les neiges sur la trace de nos chiens, nous battre avec les ours et les avalanches pour secourir un voyageur imprudent, les forces ont besoin d’être au niveau du courage ; et presque toujours le chagrin, qui fait tant de vocations, a déjà affaibli la santé des frères qui se dévouent à suivre les statuts de notre ordre.

Pendant que Mathilde admirait ce mélange d’héroïsme et de simplicité qui distinguait le supérieur de l’hospice, et qu’elle s’humiliait devant ces héros de la charité chrétienne, le père ajouta :