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— Ah ! la moindre preuve de votre affection suffit pour payer le dévouement de toute ma vie ! s’écria Maurice d’un ton qui révélait assez le secret de son âme ; mais j’ai besoin de vous savoir heureuse pour supporter le poids d’une existence sans désirs et sans but, et c’est par pitié pour moi que vous devez me laisser tenter de ramener celui qui peut seul accomplir votre bonheur.

— Croyez que je n’hésiterais pas à accepter cette nouvelle preuve d’une générosité dont je sens tout le prix, répondit Mathilde, si elle devait me rendre seulement un peu de l’espoir que j’ai perdu, et cette folle idée de prétendre captiver le cœur le plus léger ; mais cette illusion, lui-même ne parviendrait pas à la ranimer ; il a rendu mon bonheur impossible ; et comme vous, mon ami, ajouta Mathilde avec un sourire doux et triste, j’ai besoin de m’occuper d’une autre destinée pour m’aider à subir la mienne : je vous conjure de me laisser le soin de votre avenir.

— Il n’en est plus pour moi.

— Vous serez aimé : vous méritez si bien de l’être !

— Que m’importe ?

— Je n’en doute pas ; le sentiment… qui vous afflige aujourd’hui…, répliqua Mathilde avec un embarras plein de grâce, cédera bientôt à la douceur d’une affection mieux récompensée. Le plaisir de régner sur une jeune âme que le malheur n’a pas encore flétrie, l’espoir de l’en préserver, le soin de guider la femme qui