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doucement sa main pour ajouter quelques mots à la lettre qu’elle avait commencée avant qu’il n’arrivât ; tous deux convinrent d’expédier sur l’heure un courrier qui porterait cette lettre à M. de Varèze ; mais le colonel ignorait laquelle il avait suivie des deux routes qui mènent à Lyon ; et malgré l’intelligence de celui de ses gens que choisit madame de Lisieux pour remplir le message, on lui recommanda d’aller droit à Marseille pour être plus certain de ne pas manquer M. de Varèze.

Les partis décisifs, de quelque nature qu’ils soient, ont ordinairement l’avantage de remettre du calme dans l’esprit, et d’enhardir le cœur à supporter les peines qui en doivent résulter. Après le départ du courrier qui portait à Albéric l’assurance d’un amour qui triomphait de tant de considérations impérieuses, Mathilde sentit qu’elle ne s’appartenait plus ; et sans se demander si la démarche qu’elle venait de faire servirait à son bonheur, ou la livrerait au blâme et à d’éternelles inquiétudes, elle ne pensa plus qu’aux devoirs prescrits par cette démarche. Le plus difficile à remplir était bien certainement d’imposer silence à tous les gens qui se permettraient de médire devant elle de la conduite de M. de Varèze ; mais elle espérait échapper à cette difficulté en n’allant point dans le monde, et en ne recevant chez elle que le colonel Andermont. Lorsqu’elle lui fit part de ce projet, il le condamna, comme devant animer encore plus la mal-