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— Oui, madame il est parti.

Maurice prononça ces mots d’un ton qui semblait accuser Mathilde.

— Il est parti au désespoir, et je n’ai pu l’accompagner… J’ai vainement supplié le maréchal de me le permettre ; je ne lui demandais que peu de jours, le temps de me rendre a Marseille ; il a été inflexible, et le devoir…

— À Marseille ! répéta Mathilde ; qu’y va-t-il faire ?

— S’embarquer.

— Ah ! malheureuse ! s’écria Mathilde ; et elle se cacha le visage sous le mouchoir qui essuyait ses pleurs.

— Il sait qu’un bâtiment va mettre à la voile pour rejoindre notre armée en Morée, il va offrir ses services au général qui le commande, dans l’espoir de se faire tuer honorablement.

En disant ces mots, la voix de Maurice semblait étouffée sous le poids de regrets déchirants.

— Et vous, dit Mathilde, vous son unique ami, vous ne l’avez pas détourné de cette funeste résolution ?

— Je l’ai tenté en vain… mon crédit sur lui était épuisé par l’effort que j’avais obtenu de sa raison, ou plutôt de son amour, en l’obligeant à ne point se battre avec le duc de L… Ah ! madame, si comme moi vous l’aviez vu, pâle de fureur, comprimer tous les sentiments les plus vifs de son âme, faire taire la voix