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à rester libre ; mais M. de L… n’ignore pas ma résolution ; et s’il faut le dire, ajouta Mathilde en regardant sa cousine, je trouve que l’on a agi bien légèrement en répandant si vite le bruit d’un projet qui ne devait pas se réaliser.

— Ah ! Mathilde, s’écria la baronne, en parlant ainsi vous me frappez les yeux d’une triste lumière. Ce qu’on m’a dit est donc vrai ? À force de ruses, de moyens connus de lui seul, ce méchant homme est parvenu à vous plaire. Vous redoutez son esprit, vous n’estimez pas son caractère, et vous l’aimez !…

— Moi ! grand Dieu ! s’écria Mathilde comme frappée d’une terreur subite.

— Oui, vous l’aimez ; ou du moins sa malice infernale a porté tant de trouble dans votre cœur et dans votre amour-propre, que ce sentiment suffit pour vous faire sacrifier le plus beau sort au caprice d’un extravagant à la mode. Ah ! sans l’espoir que vous avez de le captiver, de l’enlever à toutes les folles qui se l’arrachent, auriez-vous la duperie, je dis plus, l’ingratitude de refuser la main du duc de L… ? Non, ce beau refus est l’ouvrage de M. de Varèze, et je lui permets de s’en réjouir comme de la plus mauvaise action de sa vie, car il ne pouvait me causer plus de chagrin.

— Je vous jure, dit Mathilde les yeux remplis de larmes, je vous jure que jamais je n’ai dit à M. de Varèze…