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dame de Lisieux, et des projets de vengeance dont j’ai eu tant de peine à te détourner, il m’était bien permis de craindre un peu pour elle.

— Il est vrai, reprit Albéric, confus du changement subit qu’un moment d’espoir, une illusion peut-être venait d’opérer en lui, j’ai abjuré ma colère ; et ce qui te paraîtra misérable, c’est que je n’ai pas un motif réel pour cela.

— Ils sont tous bons, lorsqu’ils empêchent de se venger des gens qu’on aime.

— Tu sais donc que je l’aime ? dit Albéric en serrant la main de son ami.

— Si je le sais ! reprit Maurice en levant les yeux au ciel.

— Eh bien, tu devrais m’aider à la convaincre de mon amour, ou à l’oublier.

— Ce soin te regarde seul. J’ai souvent combattu son opinion sur ton compte ; elle m’écoutait avec plaisir, mais sans me croire : ce n’est pas étonnant, mon amitié pour toi m’ôte tout crédit sur son esprit ; elle sait que je mourrais plutôt que de nuire par le moindre avis au sentiment que…

L’oppression que ressentit Maurice en prononçant ces mots ne lui permit pas d’achever. Et pour la première fois, Albéric fut frappé de la pâleur qui couvrait tout à coup le front de son ami lorsqu’il lui parlait de son amour pour Mathilde. Au même instant, une terreur secrète s’empara de son cœur, et tous les chagrins